Une histoire de méchants
Le Gangster, le flic et l’assassin s’ouvre sur la présentation des trois personnages principaux, archétypes connus. Impossible pour l’instant d’envisager une réelle comparaison… Dans un Séoul obscur, le tueur (Kim Seong-gyu) abat un homme sans motif apparent, avec une violence qui peut faire détourner le regard. Il est donc l’assassin qui unira l’inspecteur, Jung Tae-seok (Kim Moo-yeol) et le chef de gang Jang Dong-su (Don Lee aka Ma Dong-seok), après que celui-ci ait survécu à une attaque du tueur. Il est donc le premier méchant du film – ce qui parait plutôt évident d’après sa présentation. On peut également noter qu’il est appelé « the Devil » dans la version anglophone. Aucun doute pour le spectateur donc : cet assassin est le mal incarné. On mettra du temps à en apprendre davantage sur le personnage malgré son apparition précoce à l’écran. D’ailleurs, l’enquête des policiers à son sujet n’apportera aucune réelle information sur lui, ce qui peut poser problème lorsque le personnage est autant présent à l’écran. Le titre français du film résume plutôt clairement le film avant même sa découverte.


Ma Dong-seok
Le dernier personnage de ce trio de méchants est celui qui leur vole la vedette, et qui présente probablement la personnalité la plus travaillée. Le gangster nous apparait pour la première fois puissant et dangereux. Et malgré ses blessures causées par l’attaque du tueur en série qui lui font perdre en crédibilité dans son monde de criminels, il reste constamment au-dessus des autres dans le film. Le physique impressionnant de Ma Dong-seok suffit déjà à imposer le respect. Mais le réalisateur, Lee Won-tae, prend clairement un grand plaisir à le filmer pour faire ressortir toute sa force. Les ralentis et les travellings de dos récurrents dénotent cette jouissance du réalisateur à filmer l’acteur.

Un rythme incertain
L’auteure de ces lignes s’interroge sur la tournure par trop analytique d’une critique des personnages du film. Sûrement parce qu’il s’agit de l’intérêt premier de l’oeuvre. En effet, celle-ci tient à se concentrer sur la rencontre de ces trois personnages si différents, et à se poser la question de l’emplacement du mal. Et au final, l’histoire parait un peu secondaire. On tente de nous intéresser aux victimes du tueur en série, mais le pathos des situations empêche une réelle empathie. Cependant, la traque reste divertissante, mais présente peu d’intérêt émotionnellement. Cela n’empêche pas de ressentir de l’inquiétude lors de la course poursuite finale. Le réalisateur joue avec les rues labyrinthiques de Séoul en poussant les personnages dans une course dont le spectateur ne peut deviner l’issue. Aussi, les scènes de combat, bien qu’assez crues, permettent-elles également de ressentir cette inquiétude pour les personnages, qui rend le film intéressant. Étrangement, ce sont dans ces scènes violentes que l’on peut le plus ressentir l’humour du film. Il ne s’agit pas du point fort du Gangster, le flic et l’assassin, mais le réalisateur réussit tout de même à introduire ces touches d’humour dans un film au ton plutôt sombre. Ce jonglage entre les personnages et le ton de leurs scènes peut parfois désorienter. Il y a quelques coupures brutales dans le montage qui surprennent et font plutôt démonstration d’un rythme trouble plus que d’une intention cinématographique. Par ces coupures, le film donne parfois l’impression de mini cliffhanger rapides et mal amenés. Cela mène aussi à l’idée que, peut-être, le film aurait mieux fonctionné en série. La relation particulière entre l’inspecteur et le chef de gang aurait ainsi pu être développée, ainsi que le personnage du tueur qui manque cruellement de substance. Le sujet du tueur en série fonctionnerait également avec un principe d’épisodes, qui auraient pu évoquer plus longuement le passé des victimes, et ainsi réellement toucher les spectateurs.
