En ces temps de confinement (saison 2), on aurait tendance à se tourner vers des films capables de nous transporter du canap’ sans attestation ni limitation de km. A priori, un film avec Robin Williams est tout indiqué. Docteur Patch, comédie dramatique réalisée en 1998 par Tom Shadyac (Ace Ventura, détective chiens et chats, Menteur menteur, Bruce tout-puissant), et adaptée du livre Bonne santé, un remède par le rire de Maureen Mylander, ne tient pas toutes ses promesses. Pourtant, l’enfant des nineties qui sommeille en nous y a trouvé une pointe de réconfort en la personne de Robin Williams.
DOCTEUR NOUS FAIT RIRE JAUNE…
Début des années 70. Hunter Patch Adams est étudiant en médecine. Surdoué certes, mais excentrique au possible. Sa vocation – elle – n’est pas vraiment née sur les bancs de l’école ou par héritage familial, mais suite à un séjour volontaire en hôpital psychiatrique. Il s’y découvre un don pour faire rire et surtout pour réconforter les patients. De cette expérience peu banale naît un objectif : développer une nouvelle forme de médecine relationnelle basée sur le rire et l’humain, et fonder une clinique révolutionnaire. Évidemment, cela ne séduit pas le doyen de l’université. Est-ce que vous sentez la bien-pensance et les clichés arriver ? À sa sortie, le film est un succès au box-office, rapportant le double de son budget aux États-Unis. Ce dernier est même nommé aux Oscars pour la meilleure bande-son. Il faut dire que, sur le papier, la distribution est prometteuse : Robin Williams évidemment, mais également Peter Coyote (E.T, Bon Voyage) ou encore Philip Seymour Hoffman (Magnolia, The Master). Pourtant, ni l’émotion ni le rire ne sont au rendez-vous. Les personnages sont assez caricaturaux : les gentils médecins novateurs contre les méchants médecins rétrogrades ou encore les humanistes étudiants contre les arrogants jeunes médecins. La musique, signée Marc Shaiman pourtant compositeur de B.O marquantes comme La Famille Adams (B. Sonnenfeld, 1991) ou encore Sister Act (E. Ardolino 1992), est bien trop omniprésente et tire-larmes. La voix off, la mise en scène classique, les faux rebondissements, le rythme qui alterne scène dramatique et scène humoristique… Tout, ici, sent le réchauffé. Et pourtant… on s’attendrait à une certaine audace, un peu d’originalité, même légère, à l’instar de ce médecin un peu loufoque. Mais encore une fois, c’est un peu raté.

© Melinda Sue Gordon/Universal Pictures

© Melinda Sue Gordon/Universal Pictures
… MAIS ROBIN WILLIAMS SAUVE LES MEUBLES (ET NOUS MANQUE)
Et si la mise en scène, la réalisation et les acteurs peinent à convaincre, le scénario ne fait pas mieux. Le rythme est si expéditif qu’il est difficile de s’attacher aux personnages. Les raisons pour lesquelles Patch effectue un séjour en hôpital psychiatrique sont très vite éludées, son séjour aussi, alors que cette introduction aurait pu donner du poids au film. Dommage. En deux temps trois mouvements, Patch se retrouve à l’université et les actions s’enchaînent sans profondeur. Par ailleurs, et c’est regrettable, on ne croit pas tellement au professionnalisme de ce docteur qui joue plus au clown qu’au médecin. Le véritable Hunter Patch Adams est pourtant à l’origine de véritables thèses et théories basées sur la risothérapie, technique scientifique qui vise à calmer les symptômes d’une maladie par le rire. Or, dans le film, son travail est quelque peu décrédibilisé par des pitreries pas si drôles que ça. À la sortie du film, Hunter Patch Adams est d’ailleurs resté silencieux sur ce biopic. Mais voilà, on ne va pas se le cacher, un petit quelque chose nous retient. On ne trouve pas le film très bon mais on s’y accroche comme à nos souvenirs d’enfance. Époque où Robin Williams était le roi de notre étagère à VHS. Dans Docteur Patch, l’acteur tente – contre vents et marées – de porter le film sur ses épaules. Il est l’un des seuls acteurs qui réussit à nous procurer une émotion et une pointe de nostalgie poétique. En 1998, l’acteur était à un tournant de sa carrière. C’est la fin des nineties, décennie où il a incarné une flopée de personnages marquants que ce soit dans Le cercle des poètes disparus (P. Weir, 1989), Hook (S. Spielberg, 1991), Mme Doubfire (C. Columbus, 1993), Jack (F.F. Coppola, 1996), Jumanji (J. Johnston, 1995) ou Will Hunting (G. Van Sant, 1997), pour lequel il décrochera d’ailleurs un Oscar.
À cette même époque, il se tourne vers plus de comédies comme Flubber (L. Mayfield, 1997), au point d’en devenir de moins en moins bankable et de se faire un peu plus rare sur grand écran. Mais sans rancune Robin. Impossible d’en vouloir à celui qui savait nous faire rire et pleurer en un regard. Impossible d’en vouloir à cet acteur qui – avec une seule phrase – pouvait nous remonter le moral. Impossible d’oublier comme il nous a fait rêver en poussant le cri de Pan. Impossible d’oublier à quel point aurait tout donner pour l’avoir comme nounou, comme professeur, comme médecin, comme génie, comme père, comme ami. Le monde du 7e art a toujours été unanime face à son précieux talent. La preuve avec ces réactions, à sa mort, en 2014. « Robin Williams était un animateur de radio, un médecin, un génie, une nounou… et tout ce qu’on peut imaginer d’autre. Mais surtout, il était unique » exprimait Barack Obama. « Robin était un éclair de génie comique et notre rire était le coup de tonnerre qui le faisait avancer », disait Steven Spielberg. Évidemment, on ne peut qu’être d’accord et ce n’est pas Docteur Patch qui changera la donne.

Docteur Patch (Patch Adams, 1998 – États-Unis) ; Réalisation : Tom Shadyac. Scénario : Steve Oedekerk d’après le livre de Patch Adams et Maureen Mylander. Avec : Robin Williams, Josef Sommer, Bob Gunton, Daniel London, Monica Potter, Philip Seymour Hoffman, Irma P. Hall, Harve Presnell, Peter Coyote, Michael Jeter, Harold Gould, Richard Kiley, Ellen Albertini Dow, Alan Tudyk et Ryan Hurst. Chef opérateur : Phedon Papamichael. Musique : Marc Shaiman. Production : Mike Farrell, Barry Kemp, Marvin Minoff, Charles Newirth, Steve Oedekerk, Devorah Moos-Hankin, Tom Shadyac, Marsha Garces Williams, Allegra Clegg et Alan B. Curtiss – Blue Wolf, Bungalow 78 Productions et Farrell/Minoff. Format : 2.39:1. Durée : 115 minutes.
En salle le 25 décembre 1998 aux États-Unis, puis le 7 avril 1999 en France.
Disponible en VHS depuis le 22 juin 1999/ En DVD chez Elephant Films depuis le 13 octobre 2020.
Copyright illustration en couverture : Melinda Sue Gordon/William Joel/The Verge.
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