Toy Story 4 (contre)

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Rares sont les franchises si parfaites que l’annonce d’un nouveau volet est vécue non pas comme une joie, mais comme un risque. Toy Story fait indubitablement partie de celles-là, elle qui nous avait laissés il y a presque dix ans sur une scène de conclusion magnifique, indépassable en apparence. Toy Story 4 * est-il pour autant l’épisode de trop ? La réponse est oui. Il est même, par certains aspects, une trahison de la saga dont il prétend renouveler l’univers.

Le coffre à jouets

II est des chanteurs qui grandissent avec leur public. La saga Toy Story a réussi le tour de force de créer un attachement similaire par le biais du grand écran. Pour peu que vous soyez nés autour des années 90, vous étiez enfant lorsque Woody et Buzz ont débarqué dans votre vie, pré-adolescent pour le second volet, et c’est en tant que jeune adulte que vous avez refermé la trilogie, quinze ans après ses débuts, lors d’une scène d’une grâce infinie et rarement égalée dans l’histoire du film d’animation. Andy, c’était vous, et chaque nouvel épisode vous donnait l’impression de rouvrir le coffre de vos jouets préférés. Toy Story, des films sur la fugacité et la nostalgie de l’enfance qui vous invitait précisément à retomber en enfance à chaque visionnage. Qui soulignait que le temps passe et que si plus jamais nous ne jouirons de la candeur des jeunes années, d’autres le feront pour nous, toujours. Vers l’infini et au-delà. Il n’y avait rien de plus à ajouter.

© Disney/Pixar

Que raconte donc ce nouveau volet, situé neuf ans après le dépôt des jouets dans le jardin de Bonnie ? Rien ; du moins rien qui n’ait déjà était dit avec virtuosité dans les épisodes précédents. L’arrivée d’un nouveau jouet préféré, la peur de la mise au placard, l’envie de défendre coûte que coûte le bonheur de l’enfant qui entraîne les protagonistes dans une mission de secours, sont autant de leviers dramatiques sur lesquels reposait la trilogie et que ce nouveau film ressort comme de vieux jouets du grenier. Le réalisateur Josh Cooley (nouveau venu sur la saga) ne semble pas avoir grand-chose à ajouter à la question et crée donc des situations parfaitement artificielles pour se donner l’impression de dire quelque chose. Au risque, parfois, de forcer un peu trop et briser la cohérence de l’histoire. Que de scènes contradictoires ou tout simplement inutiles ! A quoi bon cette première scène qui oblige à un flashback pour nous expliquer la disparition de la bergère ? Personne ne l’avait remarquée, personne ne s’en était souciée, et une simple ligne de dialogue aurait suffi. 

A quoi bon cette situation initiale qui installe Jessie en chouchoute de Bonnie, si c’est pour introduire Fourchette juste après et faire de sa relation à l’enfant le moteur de l’histoire ? A quoi bon, d’ailleurs, nous faire croire à l’importance de la cowgirl, alors même qu’elle restera dans l’ombre tout le film, supplantée dans le rôle de la femme forte par la Bergère (devenue arbitrairement une sorte d’Imperator Furiosa badass et libre, et qui a même changé de jupe pour l’occasion…) ? Enfin, à quoi bon nous rappeler si clairement la jalousie de Woody -caractéristique principale du personnage dans le premier volet- si c’est pour le transformer sans plus d’explications en Capitaine Miller dévoué au sauvetage de son Soldat Ryan, le nouveau jouet ? Le scénario est à l’image du ventre de Zig-Zag : il se tortille dans tous les sens et s’allonge sans fin. Le final est une illustration sans égale de cette vaine agitation. Après des dizaines de minutes dédiées à convaincre la poupée Gaby Gaby de joindre la troupe des jouets, à l’exfiltrer de la boutique d’antiquités où elle languissait, à la faire rejoindre la caravane où l’attendent les autres, celle-ci part avec une enfant repérée au hasard dans la foule. Beaucoup de bruit pour pas grand-chose, à l’image du film lui-même.

© Disney/Pixar

Une nouvelle ère

Le charme de Toy Story réside aussi dans le duo attachant formé par Woody et Buzz, les Starsky et Hutch de la chambre d’enfant. Les trois premiers épisodes étaient parvenus à dépasser le cliché des deux-rivaux-que-tout-oppose-mais-qui-vont-devenir-amis pour montrer de jolies évolutions dans leurs caractères respectifs : Buzz devenait un peu moins bête, sortait de son personnage lunaire, Woody découvrait que le monde ne tournait pas autour de lui. Chacun grandissait en gardant les défauts qui les rendaient si humains malgré leur tête en plastique et leur rembourrage de coton. Autour d’eux, au fil des films, une petite troupe de jouets s’était constituée dont chaque membre avait fini par nous attacher. Trop occupé à se perdre dans ses rebondissements, le quatrième volet oublie purement et simplement ces figures historiques, reléguées à des rôles de figurants se partageant une vingtaine de répliques en une heure quarante. C’est à se demander si, à l’instar de la nouvelle trilogie Star Wars, l’objectif n’est pas ici de faire faire disparaître les anciens piliers pour lancer une nouvelle ère… La fin, du moins, va dans ce sens. On assiste donc à un ballet de nouveaux venus, plus ou moins réussis : une poupée à l’ancienne désireuse d’être aimée, un motard canadien et Fourchette, surtout, au sujet duquel il eût été intéressant de s’interroger sur la définition du jouet et ainsi rappeler le rôle démiurge de l’enfant imaginatif. Las, le film ne s’embarrasse pas d’allégories, auxquelles il préfère de loin la balourdise. Buzz porte sur ces grosses épaules ce choix de ton et subit une régression aussi violente que son reset de l’épisode 3 : il est de nouveau idiot, incapable de s’extraire de sa condition de jouet. Sa confusion entre la voix de sa conscience et sa voix enregistrée est amusante, pas assez cependant pour en faire le seul gimmick du personnage sur tout le film.

© Disney/Pixar

Un volet bâclé

En somme, on peine à retrouver les figures qui ont fait la saga, ce qui n’est pas sans conséquence sur notre intérêt pour l’histoire ici développée. Les doubles lectures et clins d’œil cinématographiques (Shining, Mad Max, Les Incorruptibles…) sont quant à eux trop rares pour occuper le spectateur. Les nouveaux jouets ont-ils le plastique assez dur pour prendre le relai sur une nouvelle trilogie ? Rien n’est moins sûr et le scénario prend bien soin de fermer tous leurs arcs scénaristiques. Par conséquent, leur retour dans un potentiel cinquième volet est moins assuré que leur présence en tant que produits dérivés dans les allées de La Grande Récrée. Toy Story 4, c’est donc le retour à la prime enfance de cette saga que l’on avait vue avec amour grandir et mûrir. Scénario collage, caractérisation gribouillis des personnages et morale babillarde… Un volet bâclé comme un coloriage qui dépasse et qui donne envie, comme Andy, de léguer nos jouets bien-aimés à une nouvelle génération de spectateurs.

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* Le film ne faisant pas l’unanimité au sein de la rédaction de Gone Hollywood, retrouvez l’avis favorable de Christopher Poulain ici.